Le tissu blanc

 

Doucement, mes mains caressent les murs recouverts de tissu

Sous mes doigts rugueux frissonne le tissu blanc

Doux mélange de coton et de laine

Sous mes genoux encore le tissu blanc qui s’enfonce

Inlassablement, sous ma pression humaine et malsaine

Partout, il me couve comme une louve de sa chaleur

Je lève la tête,  j’observe le plafond recouvert de tissu blanc

Partout, il m’entoure de son amour

 

Je m’approche de la porte encore le tissu blanc qui recouvre les gongs

Seul un petit carré en acier se découvre en son centre

Il s’entrouvre furtivement, puis se referme rapidement

Alors en transe, je cours sur le tissu

Je me tords, cri, saute, ri, chante et pleure

Heureux, repu,  je m’allonge et m’endors sur le tissu

 

Brusquement, un bruit me réveille

Des pas feutrés entrent dans la pièce

Se dirigeant lentement vers moi

Doucement j’ouvre les yeux,

Progressivement, je distingue deux individus en blouse blanche

Dont l’un au visage adipeux me dit : « c’est l’heure » !

L’heure, mais quelle heure ?

 

Prudemment, il me soulève et m’enveloppe d’un tissu blanc

Où mes mains s’engouffrent et disparaissent.

Mes pieds se posent alors sur un sol blanc et froid

Timidement, tremblant j’avance,  glissant insensiblement sur le carrelage humide

Déjà, je regrette le tissu blanc

Enfin, on m’allonge sur une grande table blanche

Des gants blancs tenant une seringue s’approchent de moi

 

Serais-je dingue que l’on m’introduit sous la peau une aiguille

Une pression et on libère un liquide blanc aqueux

Qui s’introduit comme une hyène dans mes veines érogènes

Ah ! Je me sens mieux il me réchauffe et m’indispose

Sans gène, je me soulage

Quand soudainement j’aperçois au fond d’un couloir une lumière blanche

Soulagé je m’y engage puis me raidis

Sentant une dernière fois ce tissu blanc qui me recouvre.

 

 

Peter. Bervore        Texte écrit en 2015

Le tissu blanc
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