Ce matin 

 

 

Je suis descendu de ce train ce matin

J'ai regardé partout autour de moi

J'ai écouté toutes ces voix mélangées

J'ai redécouvert tous ces bruits quotidiens

Comme un comédien, j'ai marché d'un pas mal assuré

Vers ce bout de quai aux lumières tamisées

Où malgré la douleur, j'espère que tu m'attends

 

Enfin pour moi c'est certain, tout est fini

J'y ai perdu tant d'amis

Tant de frères inconnus, ou trop connus

Je marche à côté de ces voies infinies

Sans plus aucune peur, aucune terreur

Mon sac sur ma seule épaule

Mes cheveux rasés, ma peau brûlée

Mon bras amputé me fait encore souffrir

Du coup, j'ai envie de repartir

D'aller mourir en martyr

Dans un trou d'obus entre deux tranchées

 

J'ouvre les yeux et tu es là bien vivante en face de moi

Tu es venue malgré mes lettres d'adieu

Si belle, tu me dévisages sans pleurer

Tu fais semblant de ne rien remarquer

J'ai envie de t'embrasser

J'aurais voulu pouvoir te serrer dans mes bras

J'aurais voulu pouvoir te murmurer ces quelques mots

Blottie contre moi, serrée contre toi

 

Dans quel état ils m'ont mis

Je suis détruit, abasourdi

Putain de guerre, putain d'après-guerre

Mais tu m'embrasses

Je sens ton corps chaud tressaillir contre le mien

Je suis enfin revenu parmi les miens

Et tu me prends la main

Ma seule et unique main

Putain de guerre, putain d'après- guerre

 

 

Peter. Bervore    Texte écrit en 2003

Ce matin
© 2023